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Marine Le Pen a bien senti qu’il fallait reprendre la main. « J’ai eu l’impression, à maintes reprises, que votre opinion était déjà faite, a dit, au tribunal, l’ancienne cheffe du Rassemblement national (RN). Il y a des gens devant vous qui ont une parole d’airain, d’autres qui sont inaudibles. » La présidente s’est évidemment récriée, mais ce n’est pas faux, tant le défilé des prévenus au procès des assistants FN du Parlement européen a laissé, après dix-sept jours d’audience, une écrasante impression de propos invraisemblables et de mensonges maladroits.
Marine Le Pen, déjà passée à la barre en tant qu’auteure principale de « détournements de fonds publics » pour avoir employé comme assistants son garde du corps, sa secrétaire, le directeur de cabinet et la secrétaire de son père, était, mardi 5 novembre, entendue comme « complice » des détournements, puisqu’elle a dirigé le parti de 2011 à 2021. La députée du Pas-de-Calais, qui piaffait depuis un moment, a survolé l’audience avec un talent certain, une énergie intacte et un discours construit, à défaut d’être toujours convaincant.
Pendant une heure trente, elle a donné sa vision du dossier, avant de répondre, pied à pied, au tribunal, sans céder un pouce de terrain. « Parmi les dizaines de milliers de messages du parti, les juges d’instruction ont extrait une dizaine de mails, suspects ou maladroits, autour desquels on tourne pour prouver l’existence d’un système », a attaqué la députée. Ce système, qu’elle est censée, après Jean-Marie Le Pen, avoir organisé, repose sur une série d’éléments qu’elle s’est efforcée d’écarter.
La « mutualisation » d’abord, théoriquement proscrite : la règle veut qu’un assistant travaille pour son seul député. « En 2014, nous sommes 23 élus, alors qu’auparavant nous étions 3, donc nous avions 20 députés novices, a attaqué Marine Le Pen. Pour constituer un groupe, il faut être 25, ce qui permet d’avoir une cinquantaine de salariés qui travaillent pour l’ensemble du groupe. Nous étions non inscrits, on était obligé de mutualiser. Certains assistants ont travaillé pour plusieurs députés, de manière officieuse, mais pas dissimulée. Et le Parlement européen n’y a rien trouvé à redire. »
La « centralisation », ensuite. Tous les députés FN (sauf deux) ont donné procuration à un unique assistant pour qu’il gère les relations avec l’administration et le « tiers payant », le cabinet comptable proche du FN chargé des finances. « La centralisation est dans la culture de notre mouvement, s’agace Mme Le Pen. C’était plus simple pour les députés et cela arrangeait bien le Parlement, et pas une seule fois ils ne sont venus nous dire qu’il y avait trop de procurations. Je ne vois pas en quoi les procurations et le tiers payant pourraient constituer le début du commencement d’un soupçon. »
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